Maison au bois dormant

 

Il y a peu de temps, j’ai eu la chance de photographier dans une maison normande qui n’était pas habitée depuis 8 ans. Elle était mise en vente à un prix très bas, mais personne ne se pressait pour l’acheter. À l’automne dernier, un acheteur a été trouvé - une femme qui voyait dans cette maison un projet d’investissement prometteur.

Lorsque nous sommes entrés dans la maison, l’acheteuse et moi, nous avons ressenti une sensation étrange, presque mystique. C’était une journée très ensoleillée, mais un arbre tentaculaire dans la cour faisait une mystérieuse pénombre et des ombres sur les murs délabrés. On aurait dit que les occupants précédents avaient déménagé précipitamment:

Des draps avaient été laissés dans les armoires. Par terre sont des valises, des photos, un jeu de cartes et même la Vénus de Botticelli, encadrée comme une icône, gisait dans l’âtre de la cheminée. Et sur le coffre-fort brutalement coupé, une cagoule oubliée.

Nous sommes montés au grenier. Là, sur une étagère, comme par hasard près d’un rouleau de fil de fer barbelé, se trouvait la figurine décapitée d’un saint, recouverte de poussière. Sur le sol, un journal du 15 mai 1957 titrait: « Une mère de sept enfants a tué et démembré son mari avec l’aide de sa sœur jumelle et de sa fille aînée ». J’ai braqué une torche dans le coin le plus reculé du grenier: un landau et deux bicyclettes sans roues sont apparus dans la lumière. Et si la famille dont parle le journal vivait dans cette maison? À partir de ce moment, tous les objets de nature morte de la maison sont devenus pour moi l’illustration la vie de cette famille.